Franz Liszt (1811-1886)
Figure emblématique du piano, mais aussi grand symphoniste, les attirances mystiques de Liszt sont bien connues des
mélomanes, de sa première crise mystique de 1827 aux ordres mineurs qu’il reçoit en 1865.
Parmi les œuvres vocales d’inspiration religieuse de « l’abbé Liszt » ont connaît
surtout ses grandes compositions comme la Messe solennelle de Gran, Psaume XIII, l'oratorio Christus, la messe Missa
choralis, la Messe hongroise du couronnement et le Requiem.
Peu d’auditeurs, en revanche, ont accès à ses œuvres plus intimes, à l’instar de ses pièces tardives
pour le piano, comme la Via Crucis pour chœur de chambre et harmonium ou piano, ou ses motets a cappella pour voix d’hommes
ou voix mixtes, comme les sublimes Ave verum corpus et O salutaris hostia, qui datent respectivement de 1871 et 1869.
A peine plus connue du grand public les œuvres de Liszt pour l’orgue sont pourtant considérées comme étant
tout à fait remarquables et d’un apport réel dans le répertoire de cet instrument.
Le Prélude et fugue sur B.A.C.H. (si bémol, la, do, si bécarre selon l’appellation germanique) sont une révérence
on ne peut plus explicite au grand Jean-Sébastien BACH. Les deux vesions de cette œuvre datent respectivement de 1855 et 1870.
Anton Bruckner (1824-1896)
De ce musicien autrichien qui admira Wagner et qui s’attira la reconnaissance de Mahler, le grand chef d’orchestre
Wilhelm Furtwängler a dit qu’il était « un mystique gothique égaré par erreur au XIXème siècle ».
Très connu pour ses symphonies, Bruckner était aussi un musicien mystique qui su, à l’époque romantique, renouer
avec l’art vocal de la Renaissance. Son grand biographe Ernst Kruth avait ainsi jugé que « sa véritable situation
historique, cette aspiration qui, du mysticisme médiéval, l’élève aux sommets de la sensibilité romantique,
n’apparaît nulle part plus nettement que dans sa musique d’église ».
Le Locus iste (1869), et le Christus factus est (1884), font partie des plus beaux motets de Bruckner, et malgré leur relative
brièveté, ils nous mènent vers des sommets vocaux qui sont bien les pendants des flèches gothiques ré-interprètées
par la sensibilité romantique.
Max Reger (1873-1916)
Max Reger fait partie des compositeurs allemands du tournant du XXème siècle qui, comme Ferrucio Busoni, Hans
Pfitzner, Alexander von Zemlinsky ou Franz Schrecker, sont aujourd’hui éclipsés par Mahler, Schoenberg et Strauss.
Très actif comme compositeur, pianiste et organiste, il succéda à Rheinberger à l’Akademie der Tonkunst de Munich.
Bien qu’il ait produit des œuvres significatives dans les domaines de la musique de chambre, du lied, de la musique chorale et symphonique,
c’est grâce à ses œuvres pour orgue que Reger doit d’être passé à la postérité.
Son imposante Introduction et Passacaille en ré mineur date de 1899.
Parmi ses œuvres chorales, le recueil des Acht Geistliche Gesänge (Huit chants spirituels) Op. 138 contient des pages particulièrement émouvantes
comme le motet pour double-chœur Der Mensch lebt und bestehet nur eine kleine Zeit, composé en 1914.
Joseph Gabriel Rheinberger (1839-1901)
Pendant la deuxième moitié du XIXème siècle, Rheinberger était une figure importante de
stature européenne. Très demandé en tant que professeur de composition, et estimé en tant que compositeur, ce professeur
du Conservatoire de Munich et Kapellmeister à la cour bavaroise a marqué une génération entière de musiciens.
Le fait que la plupart de ses compositions n’aient plus été exécutées après sa mort tient au changement
de l’orientation esthétique au tournant du siècle – Rheinberger était très attaché aux idéaux
conservateurs et classiques également défendus par Brahms- et au fait que ce compositeur n’ait jamais donné beaucoup
de publicité à ses propres travaux.
S’il a laissé quelques pièces symphoniques et deux opéras, c’est bien pour sa contribution au répertoire
choral sacré et à celui de l’orgue, son instrument (vingt sonates et de la musique de chambre avec violon et violoncelle), qu’il
est aujourd’hui sorti de l’oubli. Il a été l’un des professeurs du célèbre chef d’orchestre
et compositeur Wilhelm Furtwängler. Abdenlied est le troisième volet (avec Morgenlied, Hymnus) de la trilogie opus 69. Sa composition
remonte à 1855.
Félix Mendelssohn (1809-1847)
Ce grand musicien allemand qui ressuscita la Passion selon Saint-Matthieu de Bach fut un enfant prodige acclamé dans toute l’Europe
comme pianiste, chef d’orchestre et compositeur brillant. Paradoxalement, c’est plutôt pour sa musique religieuse qu’il
est redécouvert depuis quelques temps, avec notamment les grands psaumes avec solistes, chœurs et orchestre.
Enfin, le regain d’intérêt actuel pour le chant choral a cappella nous a fait connaître un répertoire somptueux
dans lequel Mendelssohn se montre l’égal des plus grands compositeurs.
Le motet à huit voix, Am Charfreitage fait partie des Sechs Sprüche Op.79 (six maximes), et montre de manière
brève une singulière capacité à combiner concentration émotionnelle et équilibre d’une rare élégance.
Johannes Brahms (1833-1897)
Grand héritier des classiques et romantiques allemands, Brahms continua l’œuvre de Beethoven, Schubert, Schumann dans les domaines
symphoniques, instrumentaux et vocaux. Il participa également à la redécouverte des maîtres anciens comme Palestrina
et Schütz, et on lui doit une édition des œuvres pour clavier de François Couperin.
Il n’est donc pas étonnant que ce soit pour la voix que cet allemand du nord installé à Vienne dès 1862 ait le
plus écrit. En effet, malgré les chefs d’œuvres de musique instrumentale qu’il nous a laissé – tant
symphoniques, que pour instruments solistes ou en musique de chambre - les lieder et la musique chorale occupent quantitativement les premières
places dans sa production. Et si ses activités de pianiste sont bien connues, il faut se rappeler que Brahms exerça longtemps le métier
de chef de chœur, tant à Hambourg qu’à Vienne.
Ce qui frappe d’ailleurs, chez ce compositeur, c’est sa capacité à fusionner une inspiration personnelle, romantique,
avec des textes et des genres sacrés, intemporels. Tout amateur de lieder a en tête les Vier ernste gesänge (Les
quatre chants sérieux), mais sait-il qu’il s’agit là de textes sacrés ?
Conscient de l’écrasant héritage musical dont il était l’un des principaux dépositaires, c’est évidemment
la mémoire de Jean-Sébastien Bach et l’héritage luthérien qu’il a honoré dans son œuvre pour
orgue, relativement méconnue et tout particulièrement dans le Prélude de choral « Herzlich tut mich
verlangen ».
Il fût composé en 1896 quelques mois avant sa mort, et avec les dix autres Préludes de Choral, Brahms y fait ses adieux au monde
et à la composition.
Le texte du choral qui sert de base à cette oeuvre instrumentale est sur ce point tout à fait édifiant : « De
tout cœur j’aspire à une fin paisible, car ici je suis prisonnier au milieu des tristesses et des malheurs. Je désire
quitter ce monde hostile, je languis des joies éternelles. Ô Jésus, ne tarde pas à venir !).
La Missa canonica telle qu’on la publia sous ce titre en 1984 ( !) est en réalité la réunion d’une
messe inachevée (Sanctus-Benedictus et Agnus Dei à 5 voix) et du Kyrie en sol mineur à 4 voix. Cette musique, composée
en 1856, comme le Geistliches Lied, fût réemployée vingt ans plus tard par Brahms pour ses Motets Op.74.
Le compositeur y fait un large usage de sa technique préférée, le canon, d’où son titre Missa canonica.
Considéré comme la plus ancienne œuvre chorale conservée de Brahms, le Geistliches Lied fut composé en
1856 à Düsseldorf et publié en 1864 au titre de l’opus 30.
De facture très stricte, son austérité et son recueillement engendrent une grande émotion qui vient à la fois
du texte – une Ode de Paul Flemming (1609-1640) exprimant la confiance en Dieu au milieu des malheurs de la Guerre de Trente Ans, que des
circonstances dans lesquelles Brahms cette pièce – il avait finalement pris conscience de l’impossibilité de soigner son
ami Robert Schumann.
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